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  • Madagascar : «Il y aura des procédures contre toutes les personnes qui ont commis des infractions»
    « Avant la fin de l'année, Madagascar va lancer des poursuites judiciaires contre le président déchu Andry Rajoelina », a annoncé ce lundi 1er décembre sur RFI la nouvelle ministre de la Justice de Madagascar, Fanirisoa Ernaivo. Depuis son exfiltration par la France, le 12 octobre dernier, Andry Rajoelina vit sans doute à Dubaï, où il a placé une partie de sa fortune. Mais il est soupçonné par les nouvelles autorités malgaches de graves faits de corruption. En ligne d'Antananarivo, la ministre de la Justice fait le point, au micro de Christophe Boisbouvier, sur les procédures contre les dignitaires de l'ancien régime de Madagascar. RFI : Fanirisoa Ernaivo, le régime d’Andry Rajoelina est accusé de multiples actes de corruption. Est-ce que vous n'êtes pas submergée par le nombre de dossiers ? Fanirisoa Ernaivo : Effectivement, nous sommes submergées par un grand nombre de dossiers qui n'ont pas pu être instruits au moment où ils étaient encore au pouvoir. À lire aussiMadagascar: la société civile critique la trajectoire prise par la transition L'une des causes de l'insurrection du mois d'octobre, c'est le manque d'eau et d'électricité à Antananarivo, est-ce que la société étatique Jirama, qui produit et distribue l'eau et l'électricité, a été l'objet de graves détournements ? Je ne pourrais vous dire oui ou non, parce qu'il y a des détournements et la mauvaise gouvernance dans la Jirama. Mais ça, je ne pourrais en parler dans l'affirmatif sans avoir un dossier devant moi. Et nous sommes en train de faire un audit des contrats de la Jirama au niveau du gouvernement. Et c'est là, après cet audit, après la révision de ces contrats, qu'on pourra parler de quel est vraiment le détournement de pouvoir dont on pourrait accuser quelques personnes et quelques entités dans cette histoire de défaillance de la Jirama. Est-ce que parmi les personnes soupçonnées d'être impliquées dans ces détournements à la Jirama, il y a le milliardaire en fuite, Mame Ravatomanga ? Pour l'instant, on est en train de commencer. Je n'ai même pas encore eu le dossier devant mes yeux. Et donc, sans vouloir tout de suite spoiler le contenu de cet audit, je vais dire qu'il y a des personnes dont, éventuellement, l'opérateur économique, Mame Ravatomanga, plusieurs sociétés, dont il a des branches, pourraient être mises en cause dans les résultats de cet audit. Des sociétés qu'il contrôle de façon indirecte ? Voilà. Dans la filière du litchi, il y avait une société écran qui s'appelait Litchi Trading Company, LTC, et par laquelle transitaient les fonds entre importateurs et exportateurs. Et du coup, tous les exportateurs malgaches viennent d'être approchés par les enquêteurs du Bianco, le bureau indépendant anticorruption. Est-ce à dire que ce sont tous les exportateurs malgaches de Litchi qui ont trempé dans de graves détournements d'argent ? On ne va pas parler de détournement, on va parler d'évasion fiscale. Concernant le dossier Litchi, du groupement des exportateurs de litchi, en effet, il y a eu la création de cette entité qui s'appelle GEL, Groupement des Exportateurs de Litchi. Normalement, ce groupement devait être institué pour pouvoir acheter à des prix avantageux pour les producteurs et pour revendre à l'exportation à des prix avantageux pour l'État et les exportateurs, en termes de retour de rapatriement de devises. Mais ces exportateurs-là, donc, ils vont collecter la production des produits, des producteurs locaux, et ils vont revendre toute la production à une société qui s'appelle LTC, qui est basée à Maurice, et donc qui devient le principal débouché de toute la production malgache. Alors que ce LTC, il s'avère que ça appartient à quelques têtes des membres du GEL. Et cela, donc, s'apparente à plafonner les devises issues de cette exportation au niveau de la vente effectuée entre le GEL et les exportateurs. Après, la LTC, la LitchiTrading Company, va revendre toute la production à d'autres distributeurs qui sont vraiment les vrais distributeurs de l'litchi dans le monde. Mais leur chiffre d'affaires va s'arrêter au niveau de la LTC, qui reste à Maurice. La fameuse société écran ? Voilà, la fameuse société écran. Et donc, du coup, l'État malgache va pouvoir rapatrier juste les devises qui ont été payées au niveau du GEL vers LTC. Et ça s'arrête là. Ça permet de cacher une grande partie des bénéfices ? Ça permet de soustraire une grande partie des bénéfices issus de cette exportation de litchis. Et comme la société est mauricienne, même s'il y a quelques membres du GEL qui sont derrière cette société, Madagascar pense qu'il y a quand même une lésion envers l'État malgache et le fisc malgache, parce que nous, nous ne savons pas donc quel est le vrai chiffre d'affaires du GEL. Parce que ça s'arrête à Maurice. Et combien d'opérateurs économiques sont visés par cette enquête ? Je ne suis pas encore en mesure de vous donner des noms ni des chiffres. Parce que l'enquête est en cours. Ce dossier de GEL LTC est actuellement en instruction parallèle entre Bianco Madagascar, PNF en France. Le parquet national financier et la FCC à Maurice  La commission d'enquête financière de l'île Maurice ? Voilà. Et pour cette enquête-là, le dossier a été déposé en 2021 par Transparency International.  Et il a été réouvert ici à Madagascar à notre arrivée au mois d'octobre dernier. D'accord. Donc l'enquête redémarre depuis le mois d'octobre ? On va dire qu’elle a débuté à Madagascar depuis fin octobre. Donc l'enquête redémarre depuis le mois d'octobre ? Depuis le changement de régime ? Voilà. Ça je voulais le préciser. Donc là actuellement, je n'ai pas encore tous les éléments d'information parce qu'il y a des enquêtes là-dessus. Mais ce qui est sûr, c'est que Mame Ravatomanga est parmi les personnes qui sont directement ou indirectement dans le LTC. Mais ce sera les résultats de l'enquête qui vont le confirmer s'il dirige directement ou indirectement cette société. LTC, Litchi Trading Company, la fameuse société écran ? Dans tous les cas, il dirige cette société. Cette société lui appartient et c'est là que je dis directement ou indirectement. Et il y a d'autres personnes également, je pense. Mais on le saura plus tard. Et donc l'infraction qui est constituée dans ce dossier est donc une évasion fiscale au détriment de l'État malgache. Et l’Ile Maurice est donc coopérative pour identifier le montant et la gravité de l'évasion fiscale. Autre dossier emblématique, Madame la Ministre, celui de 5 avions Boeing 777 qui ont été livrés clandestinement à une compagnie iranienne, Mahan Air. Malgré les sanctions américaines contre l'Iran, les certificats d'immatriculation de ces 5 avions ont été décernés à Madagascar. Alors où en est l'enquête ? Actuellement, nous sommes également sur ce dossier conjointement avec Maurice, le FBI et Madagascar. Nous avons repris les enquêtes au fond sur les principales personnes auteurs ou co-auteurs ou témoins. Et nous avons convoqué l'ancien ministre des Transports, pour être entendu au niveau du pôle anticorruption. Mais son avocat a répondu que le pôle anticorruption n'était pas compétent pour entendre l'ancien ministre. Sur lequel nous avons répondu que selon l'article 134 de la Constitution, pour les infractions de crimes ou délits qui sont extérieures à la fonction de ministre, même les ministres et les personnes assujetties à la haute cour de justice sont justiciables devant les tribunaux de droit commun, donc le pôle anticorruption, sans passer par la haute cour de justice. D'accord. Donc on attend s'il va s'exécuter ou pas selon cet article 134. Il y a plusieurs autres personnes qui ont été indiquées. Et qui ont été réentendues dans le cadre de cette enquête. Elles sont passées en enquête au fond, devant le pôle anticorruption, dans le cadre de cette enquête. Je n'ai pas le nombre de personnes qui sont citées dans le dossier Alors on retrouve aussi dans ce dossier apparemment le nom de Mame Ravatomanga, le milliardaire qui s'est enfui à l'île Maurice. Puisque selon nos confrères du site d'information scoop.mu, c'est ce milliardaire qui aurait usé de ses bonnes relations, avec les autorités malgaches et l'aviation civile malgache, pour faire homologuer ces 5 Boeings à destination de l'Iran. Et pour cela il aurait touché une commission de 5 millions d'euros ? Oui en effet c'est ressorti dans le dossier qu'il a perçu ce montant de 5 millions d'euros ou de dollars, pour permettre la délivrance de la première immatriculation de ces 5 avions. Immatriculation provisoire. D'accord. ll y a 1, 2, 3, je pense qu'il y a plusieurs personnes qui ont soutenu ce fait. Mais surtout il y a 2 personnes qui sont les témoins clés, témoins mais mis en cause aussi, dans cette remise de somme d'argent. Notamment les personnes qui lui ont remis la somme, et la personne qui a servi d'intermédiaire à cette remise. Je ne peux pas vous dire les noms pour protéger leur témoignage, si elles sont également mises en cause. Mais donc il y a 2 personnes. Et c'est 2 personnes qui devaient confirmer ce fait Alors vous parlez du FBI, le bureau d'investigation fédéral des Etats-Unis. Est-ce qu'il y a actuellement sur le sol de Madagascar des inspecteurs du FBI ? Actuellement non, mais on a demandé leur collaboration sur ce dossier. Je pense qu'ils sont encore sur ce dossier, mais aux Etats-Unis, mais pas encore à Madagascar. Alors quand le milliardaire Mame Ravatomanga a quitté Madagascar pour l'île Maurice, vous avez été mandatée, vous n'étiez pas encore ministre à l'époque, vous avez été mandatée par les nouvelles autorités malgaches pour aller à Port-Louis et pour obtenir l'extradition de monsieur Ravatomanga. Où en est la procédure ? Je vais rectifier. Ma mission sur Maurice, c'était de représenter le nouveau gouvernement, les nouveaux dirigeants de l'Etat malgache pour suivre le dossier et faire toutes les diligences concernant ce dossier. Et donc rapporter à Maurice toutes les infractions, toutes les actions commises sur Madagascar par Ravatomanga et consorts, faire un état de toutes les procédures qui existent à Madagascar contre Mame Ravatomanga et consorts, appuyer la plainte qui a été déposée par un Malgache à Maurice contre Mame Ravatomanga et consorts, et dans le cadre de tout cela, faire écho d'un mandat d'arrêt international décerné à Madagascar contre Mame Ravatomanga, et ce mandat d'arrêt doit être soldé par une extradition. Une extradition à la fin de toutes ces procédures, en sachant qu'une extradition ne peut être effectuée qu'à la fin d'une procédure. Quelle est la situation judiciaire de Mame Ravatomanga aujourd'hui à l'île Maurice ? Il est en état d'arrestation et comme son état de santé s'est dégradé depuis son arrivée à Maurice jusqu'à ce jour, il est en état d'arrestation mais il passe donc sa détention dans une clinique privée ou dans un hôpital. Son statut juridique est un état d'arrestation. Et que souhaitez-vous maintenant à son sujet ? Nous souhaitons poursuivre l'enquête sur les plusieurs dossiers dans lesquels il est impliqué à Madagascar et nous avons demandé des commissions rogatoires internationales à Maurice pour pouvoir faire ses auditions et les enquêtes sur sa personne, sur les personnes qui pourraient être impliquées avec lui et qui sont actuellement sur Maurice, notamment toute sa famille et ses collaborateurs et également faire des enquêtes financières sur ses sociétés à Maurice, conjointement avec la FCC. La commission d'enquête financière mauricienne. Et si au bout de cette enquête il y a procès, est-ce que vous souhaitez qu'il ait lieu à Maurice ou à Madagascar ? Je pense que pour l'instant il est plus judicieux qu'il reste à Maurice car à partir du moment où il sort de Maurice, on n'est plus sûr de rien. On n'est pas sûr qu’il va arriver à Madagascar, on n'est pas sûr qu'il va atterrir à Madagascar ou dans un autre pays. Sauf s'il y a extradition. L'extradition, je vous le dis, c'est après une condamnation. Nous pouvons le condamner ici à Madagascar et le faire condamner également à Maurice et ce ne serait qu'après cette condamnation qu'il va devoir rejoindre les prisons malgaches parce qu'en fait l'extradition c'est, on va dire, la réalisation d'un emprisonnement sur le territoire d'origine. C'est-à-dire ? C'est-à-dire malgache, là où s'est perpétrée l'infraction. Donc si je comprends bien, au bout de l'enquête actuelle, il pourrait y avoir un procès à Madagascar en l'absence de M. Ravatomanga. Et en cas de condamnation, il pourrait être ensuite extradé de Maurice à Madagascar, c'est ça ? Oui, et il pourrait également être jugé à Maurice par les autorités mauriciennes et peut-être soldé par une condamnation si les faits sont avérés. Il pourrait donc y avoir deux procès en parallèle ? Un à Maurice et un à Madagascar ? Exactement. Mais sur des faits différents alors ? Sur des faits différents. Au moment de l'insurrection du mois d'octobre, beaucoup d'autres dignitaires de l'ancien régime se sont enfuis, à commencer par le président, Andry Radjoelina, le Premier ministre, le président du Sénat. Alors du coup, beaucoup de Malgaches se demandent pourquoi vous n'avez pas lancé contre eux des mandats d'arrêt internationaux alors que vous l'avez fait contre M. Ravatomanga ? Si, on en a fait contre l'ancien maire de Tana. Il est impliqué dans un dossier où il y a plusieurs personnes qui sont placées sous mandat de dépôt et où lui-même est inculpé. Mais il a pu se soustraire à l'arrestation. On a lancé un mandat d'arrêt à Madagascar et internationaux contre lui au cas où il arriverait à sortir de Madagascar. Mais pour les autres, les mandats d'arrêt internationaux ne peuvent être faits que sur la base d'une procédure déjà ouverte. Or, aucune procédure n'a été ouverte, ni contre le président Andry Rajoelina, ni contre l'ancien Premier ministre, ni contre l'ancien président du Sénat ? Pas encore. Et justement, quelles sont les personnes contre qui vont être ouvertes des procédures ? Je ne dirais pas les noms parce qu'il y en a qui sont encore à Madagascar et qui risquent de s'enfuir si je vais dire les noms. Il y a des procédures qui ont déjà été ouvertes. Par exemple, pour Mame Ravatomanga, il y a eu ls Boeing 777. Il y a le dossier GEL-LTC. Avec ces deux procédures-là, qui étaient au PNF et au Bianco, il y a eu un mandat d'arrêt pour pouvoir permettre aux juridictions compétentes de procéder à une enquête envers Mame Ravatomanga. Il y a eu une procédure ouverte au niveau du Bianco et du pôle anticorruption contre Le Maire de Tana et Consort. Et comme il n'a pas pu se présenter à cette enquête, un mandat d'arrêt international a été décerné à son encontre également pour pouvoir le présenter devant la justice. On parle du maire d'Antananarivo ? On parle de l'ancien maire, oui. Pour Andry Rajoelina, en tant qu'ancien président, il faut qu'il soit présent. Il faut qu'il y ait une procédure ouverte et nous sommes en train de voir quelles sont les possibilités, ainsi que les autres membres du gouvernement. On est en train également de voir quelles sont les possibilités. Et une fois que ces possibilités de poursuites sont ouvertes, des convocations vont être envoyées. Convocations d'abord et puis mandat d'arrêt après. Et s'ils ne sont pas à Madagascar, donc des mandats d'arrêt internationaux. C'est comme ça en fait les procédures. On ne peut pas lancer tout de suite un mandat d'arrêt. Il faut d'abord qu'on ouvre l'enquête. Qu’on fasse les convocations. Et s'il est avéré que la personne n'est pas à Madagascar, on lance le mandat d'arrêt. Donc vous envisagez une procédure contre l'ancien président Andry Rajoelina ? Bien sûr. Pour toutes les personnes qui ont commis des infractions dans ce pays, il y aura des procédures qui seront ouvertes contre elles, y compris Andry Rajoelina. Et contre Andry Rajoelina, cette procédure pourrait-elle être ouverte d'ici la fin de l'année ? Bien sûr, avant la fin de l'année. Donc dans les semaines qui viennent ? Je ne pourrais pas vous dire dans combien de temps. Avant la fin de l'année. Et sur quelle base ? Sur quels faits précis ? Quand la procédure sera ouverte, vous aurez la communication là-dessus. Plus les avocats de la défense savent moins longtemps à l'avance, moins ils peuvent se défendre. Et préparer leurs alibis. Donc je ne peux pas vous dire sur quelle base on va les inculper avant d'entamer la procédure. C'est sûr qu'ils vont être poursuivis. Mais on ne peut pas vous dire là tout de suite sur quelle base. Sinon ils vont anticiper les preuves, ils vont préparer leur défense, leurs alibis, etc. Et ça rentre dans le cadre du secret de l'instruction. C'est sûr que l'ancien président Andry Rajoelina va être poursuivi ? Voilà. Donc ça c'est une certitude. Alors on sait que beaucoup d'avoirs...Et je pense que lui-même, il n'ignore pas qu'il a commis des infractions dans ce pays. À lire aussiMadagascar: Emmanuel Macron propose au nouveau dirigeant malgache «l'appui de la France» pour la transition
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  • Valentine Rugwabiza: «Les progrès accomplis par la Minusca en Centrafrique ont besoin d’être consolidés»
    La représentante spéciale des Nations unies à Bangui et patronne de la Minusca, Valentine Rugwabiza est notre invitée ce samedi 29 novembre. Menacé par les coupes drastiques demandées par les États-Unis, le mandat de cette importante force de maintien de la paix – dont le budget annuel est supérieur à 1 milliard de dollars – a finalement été renouvelé par le Conseil de sécurité mi-novembre. Valentine Rugwabiza donne des pistes sur l'avenir de la mission et évoque aussi les élections prévues pour le 28 décembre prochain dont la Minusca est le partenaire technique. Elle a reçu notre journaliste François Mazet à Bangui. À lire aussiCentrafrique: «Je ne dis pas que tout est parfait, mais nous avons fait un grand pas», estime le président Touadéra À lire aussiCentrafrique: la Mission de maintien de la paix des Nations unies prolongée d'un an par le Conseil de sécurité
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  • Guinée-Bissau: «On assiste à une confiscation du pouvoir par les militaires»
    Pourquoi ce coup d'État en Guinée-Bissau ? Est-ce une machination pour empêcher l'opposition d'accéder au pouvoir au terme de la présidentielle de dimanche dernier ? Voici la réponse de Maurice Toupane. Il est chercheur principal au bureau de Dakar de l'ISS, l'Institut d'études de sécurité. En ligne de Dakar, il répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Est-ce que les premières tendances et les résultats provisoires donnaient un score serré entre Sissoco Embalo et Fernando Dias ? Maurice Toupane : Les tendances semblaient donner une avance au candidat Dias. En tout cas, les partisans de Fernando Dias, y compris lui-même, réclamaient la victoire dès le premier tour.  Alors, quels sont les rapports aujourd'hui entre le PAIGC et Fernando Dias d'un côté et l'armée de l'autre ?  Alors, il faut dire que le leadership actuel du PAIGC a des relations un peu tendues avec certains officiers de l'armée bissau-guinéenne. Domingos Simoes Pereira, qui a été élu président du PAIGC depuis 2014, a voulu couper le lien ombilical entre le PAIGC et certains réseaux au sein de l'armée bissau-guinéenne. Donc l'objectif de Domingos Simoes Pereira était d'écarter l'armée du jeu politique afin d'inscrire la Guinée dans une dynamique de stabilisation à long terme.  Alors pourquoi ce coup d'État à votre avis ?  Alors, il y a beaucoup de flou autour de ce coup d'État. Il y a bien sûr l'hypothèse d'une machination qui serait organisée par le régime en place pour ne pas donner le pouvoir à Fernando Dias, le principal challenger du président Embalo. En effet, les motivations qui ont été avancées par le Haut commandement militaire pour la restauration de la sécurité nationale créent le doute auprès de beaucoup d'acteurs en Guinée-Bissau. Si c'était le cas, on aurait pu imaginer la mise en place de mécanismes qui auraient pu empêcher la survenance de cette tentative de déstabilisation et la poursuite du processus électoral. Donc, la déclaration de l'arrêt du processus électoral tend à accréditer l'hypothèse selon laquelle ce coup d'État a été effectivement organisé pour stopper le processus électoral et, bien sûr, empêcher l'accession au pouvoir de l'opposition.  D'où l'arrestation ce mercredi de Domingos Simoes Pereira… Oui, effectivement, Domingos Simoes Pereira a été arrêté. D'ailleurs, le PAIGC et beaucoup d'acteurs politiques appellent à une mobilisation populaire pour demander sa libération.  En revanche, Fernando Dias, les militaires n'ont pas réussi à l'arrêter ce mercredi ? Oui, il y avait eu une tentative d'arrestation, mais qui n'a pas prospéré. Il serait actuellement en lieu sûr d'après ses partisans et serait également recherché par les autorités militaires.  Donc, l'hypothèse d'une entente entre l'armée et le président sortant Sissoco Embalovous paraît une hypothèse tout à fait sérieuse, c'est ça ?  Alors, ce n’est pas la première fois que ce type de scénario se déroule en Guinée-Bissau. Rappelez-vous des élections en 2012, le coup d'État intervenu le 12 avril, alors qu'on se préparait à aller à un deuxième tour avec Carlos Gomez Junior qui était le favori devant Kumba Yalá. Donc, l'hypothèse d'une jonction entre des intérêts politiques et des intérêts militaires pour arrêter le processus actuel, pour moi, demeure crédible.  Et déjà en 2012, l'armée avait interrompu le processus électoral… Tout à fait.  Aux dépens de Carlos Gomez Junior du PAIGC… Aux dépens de Carlos Gomez Junior. Elle avait installé une transition de deux ans qui avaitdébouché sur l'organisation des élections générales.  Le nouvel homme fort, le général Horta N'Tam, promet de rendre le pouvoir au bout d'un an de transition. Est-ce que c'est crédible ?  C'est possible. Et il faut remarquer d'abord que, depuis le coup d'État de Nino Vieira dans les années 80, c'est la première fois que l'armée bissau-guinéenne perpètre un coup d'État et conserve le pouvoir. Après tous les autres coups d'État, le pouvoir était retourné aux civils à la suite de la mise en place d'une transition qui était dirigée par des acteurs civils. Mais là, on assiste à une confiscation du pouvoir par les militaires. Je pense qu'il nous faudra prêter attention à la mise en place de cette transition, notamment pour les acteurs tels que la Cédéao, qui ont déjà appelé à un retour à l'ordre constitutionnel.  Et qui peuvent peser quand même sur la transition actuelle… Oui, depuis 2012, la Cédéao a été le principal acteur du processus de stabilisation et donc la Cédéao a très peu de marge de manœuvre. Mais il y a une fenêtre d'opportunité pour s'impliquer davantage dans le processus de stabilisation du pays, soit en étant ferme sur la condamnation du coup d'État et en appelant à un retour à l'ordre constitutionnel et à la poursuite du processus électoral, soit en s’inscrivant dans une logique d'accompagnement de cette transition d’un an pour un retour très rapide à l'ordre constitutionnel.
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  • Guinée-Bissau: «Tout semblait indiquer que l'opposant était en passe de l'emporter»
    Que s'est-il passé hier en Guinée-Bissau ? Le président Umaro Sissoco Embalo a-t-il vraiment été renversé, ou a-t-il mis en scène un faux putsch pour conserver le pouvoir ? Ce qui est sûr, c'est que cette opération militaire est intervenue trois jours après une élection présidentielle que le candidat d'opposition Fernando Dias affirmait avoir remportée. Francis Kpatindé est spécialiste de l'Afrique de l'Ouest et maître de conférences à Sciences Po Paris. Il répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Alors sur France 24, Umaro Sissoco Embalo confirme qu'il a bien été renversé, mais le parti d'opposition PAIGC affirme que c'est une mascarade organisée par le président lui-même pour empêcher le candidat d'opposition Fernando Dias d'être proclamé vainqueur de la présidentielle ? Francis Kpatindé : Alors, à qui profite le putsch ? À Umaro Sissoco Embalo, il ne faut pas l'exclure. Si tel était le cas, ça signifierait qu'il a préféré se dessaisir au profit de l'armée plutôt que d'admettre le fait d'avoir été battu dans les urnes par un opposant mineur, quoique soutenu par le parti historique, le PAIGC. Alors, si tel était le cas, le président sortant aurait fait un pari risqué, car il est rare que des militaires putschistes, en tout cas en Afrique, se dessaisissent du pouvoir au profit d'un autre. Et vous n'excluez pas l'hypothèse que ce sont tout simplement les militaires qui ont pris le pouvoir en renversant tout le monde ? C'est l'autre hypothèse, c'est qu'une partie de l'état-major a décidé d'anticiper des troubles éventuels en se saisissant du pouvoir. Il ne faut pas l'exclure du tout aussi, parce que ça m'étonnerait que le président sortant ait opté pour l'armée parce qu'il sait pertinemment, il est militaire lui-même, il sait pertinemment que le pouvoir pris par un autre militaire ne lui reviendrait plus. Ce serait un jeu dangereux ? Extrêmement dangereux que de vouloir se soustraire au verdict des urnes. Parce qu’il faut dire que les derniers décomptes dont on a été informés par des ONG, mais également par des institutions régionales, tout semblait indiquer que l'opposant était en passe de l'emporter. Je parle de Fernando Dias da Costa, qui était en passe de remporter cette élection présidentielle. Dès le premier tour ? Dès le premier tour de scrutin, c'était serré et les résultats étaient serrés. Il manquait deux régions électorales et les résultats de ces deux régions sont intervenus donc le mercredi en matinée. Est-ce que c'est ça qui a poussé le président sortant à choisir la solution du putsch ? L'avenir nous le dira. Mais pour le moment, il semble qu'il ait été arrêté comme ses opposants. Alors justement, vous parlez d'arrestations. D'après plusieurs sources recueillies par le service lusophone de RFI, le candidat d'opposition Fernando Dias et le leader PAIGC Domingos Simoes Pereira auraient été arrêtés hier par les militaires… Alors s'ils ont effectivement été arrêtés, ça signifie que le pouvoir est là pour perdurer. Parce que d'abord, suspendre une élection qui est en cours, dont les résultats devaient intervenir ce matin, et puis fermer les frontières, ça a tous les attributs d'un coup d'État. Je ne crois pas que ce pouvoir soit là pour un bref moment. Je pense que les militaires sont là pour perdurer, comme la plupart des putschs qui ont eu lieu dans la région, dans l'Afrique de l'Ouest, mais également en Afrique centrale ces dernières années. Mali, Burkina, Niger, Guinée-Conakry, Guinée-Bissau, aujourd'hui, depuis cinq ans, les coups d'État se multiplient en Afrique de l'Ouest. Est-ce à dire que la démocratie est en péril dans cette sous-région ? On va finir par le croire. Les putschs à répétition hypothèquent l'avenir de l'Afrique, surtout dans sa frange occidentale. Ils risquent d'hypothéquer les résultats économiques positifs observés ces dernières années et ils pourraient, si ce n'est déjà fait, provoquer un effet domino qui risquerait d'emporter la plupart des pouvoirs ouest-africains. Enfin, moi, je trouve qu'ils font le lit du terrorisme jihadiste qui pourrait profiter de l'instabilité politique et de l'implosion des sociétés africaines pour étendre un peu plus de son influence vers les États côtiers. Donc, il y a du souci à se faire pour les prochaines années.
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  • RDC-Rwanda: «Il y a des violations permanentes du cessez-le-feu par l’armée congolaise»
    Y aura-t-il une rencontre Kagame-Tshisekedi à Washington d'ici Noël ? Rien n'est moins sûr. « Il n'y aura la paix dans l'est du Congo que si les génocidaires FDLR sont neutralisés », affirme sur RFI le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, qui déplore le manque de volonté politique de Kinshasa pour lancer cette opération. Le ministre précise qu'une telle neutralisation des FDLR « ouvrira la voie à la levée des mesures de défense du Rwanda » au Congo. En ligne de Luanda, où il vient d'assister au septième sommet Afrique-Europe, le chef de la diplomatie rwandaise répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Où en sont les discussions entre votre pays et la République démocratique du Congo en vue d'une signature de la paix à Washington ?   Olivier Nduhungirehe : La paix a déjà été signée le 27 juin à Washington. À Washington, les discussions de mise en œuvre se déroulent, il y a des progrès. Mais notre problème, c'est qu'il y a des violations permanentes du cessez-le-feu par l'armée congolaise.   Alors ce que tout le monde attend, c'est une rencontre à Washington entre le président Kagame et le président Tshisekedi. Quand est-ce qu'elle aura lieu ?   Elle aura lieu dans quelques jours. Mais le problème, c'est qu'il y a des bombardements quotidiens de la part des avions de chasse et des drones d'attaque de l'armée congolaise, non seulement contre des positions de l’AFC/M23, ce qui est bien sûr en violation du cessez-le-feu, mais aussi, ce qui est plus grave, contre les villages Banyamulenge, ces Tutsi congolais du Sud Kivu, dans un contexte de montée des discours de haine.   Alors, ce que disent les autorités congolaises, notamment par la voix de Patrick Muyaya, c'était sur RFI il y a quelques jours, c'est qu'il n'y aura de véritable paix que quand vous aurez renoncé à vos mesures de défense sur le territoire congolais…  Et bien Patrick Muyaya devrait lire l'Accord de paix de Washington. Il n'y aura de paix que si les FDLR, les génocidaires FDLR qui sont soutenus, financés par Kinshasa et qui sont même intégrés dans l'armée, sont neutralisés, comme l'exige le Conops, le concept des opérations, qui a été signé dans le cadre de l'accord de paix de Washington. Et c'est la neutralisation de ces génocidaires FDLR, soutenus par Kinshasa, qui ouvrira la voie à la levée des mesures rwandaises de défense.   Les autorités congolaises disent que le désarmement des FDLR a commencé…  Mais on ne le voit pas, sauf si c'est dans une réalité parallèle. Les FDLR n'ont pas été neutralisés, comme cela est exigé par l'Accord de paix de Washington. Il y a eu, il vous souviendra, ce communiqué des FARDC qui a appelé les FDLR à déposer les armes. Et puis après il y a eu un communiqué des FDLR qui a prétendu qu'elles sont prêtes à déposer les armes au camp de la Monusco, mais qu'elles en sont empêchées par le M23. Et puis récemment, vous avez vu cette interview du porte-parole des FDLR qui a dit qu'elles ne déposeront jamais les armes, qu'elles vont se battre jusqu'au bout. Et donc les FDLR sont toujours soutenues par Kinshasa. Rien ne se fera sans qu'il y ait la bonne foi et la volonté politique de Kinshasa sur cette question des FDLR puisqu’on en parle depuis longtemps, mais à l'heure où on vous parle, les FDLR sont toujours intégrées dans l'armée congolaise. Elles sont toujours soutenues par Kinshasa.   Mais franchement, la cartographie du déploiement des FDLR par les autorités congolaises, ce n'est pas la preuve que celles-ci sont de bonne foi ?  Mais l'accord de paix de Washington parle de neutralisation des FDLR. C'est ce qui doit se passer. Ce n'est pas une cartographie, ce ne sont pas des communiqués, des appels à déposer les armes. C'est la neutralisation effective des FDLR. Et jusqu'à présent, on ne voit pas de neutralisation de ces génocidaires FDLR depuis le 27 juin qu'on a signé cet accord. Ça fait plus de cinq mois.   Et si demain la neutralisation commence réellement, est-ce que vous, vous vous engagez à renoncer aux mesures de défense que vous avez prises sur le territoire congolais ?   C'est dans l'Accord de paix de Washington. L'aspect sécuritaire parle de neutralisation des FDLR et de levée de mesures rwandaises de défense. Donc, si les FDLR sont neutralisées, le Rwanda va lever ses mesures de défense.   Et ce serait l'affaire de quelques semaines, cela pourrait permettre un accord définitif d'ici Noël ?  Je ne sais pas. Il y a un chronogramme qui est dans le Conops, les 90 jours. Mais de toute façon, il faut toujours la volonté politique de neutraliser ces FDLR. Et puis on va voir bien sûr quand et comment ça se fera. Mais sans volonté politique, rien ne se fera.   Pendant ce sommet Afrique-Europe de Luanda, la ministre congolaise des Affaires étrangères a demandé à l'Union européenne d'adopter de nouvelles sanctions contre votre pays. Quelle est votre réaction ?   Oui. Ma collègue Thérèse Kayikwamba Wagner ne fait que ça depuis février. Elle demande toujours des sanctions contre le Rwanda. Mais maintenant, on est fin novembre. Un accord de paix est passé par là. C'est quand même assez curieux que ma collègue congolaise demande des sanctions contre un pays avec qui on a signé un accord de paix. J'étais avec elle le 27 juin pour signer cet accord. Au lieu de mettre en œuvre cet accord, elle demande toujours des sanctions contre le Rwanda. Et puis, s'il y a des sanctions à demander, pourquoi ne demanderait-on pas des sanctions contre ceux qui affament des populations Banyamulenge et ceux qui bombardent ces populations, ceux qui collaborent avec un mouvement génocidaire et ceux qui répandent des discours de haine à travers les groupes Wazalendo qu'on a créés. Donc, à jouer à ce petit jeu de sanctions, je pense qu’on n’en sortirait pas. Il y a des accords qu'on a signés, à la RDC de les mettre en œuvre au lieu d'aller partout sans arrêt demander des sanctions.    À lire aussiRDC-Rwanda: le processus, conduit en partie par Washington, doit déboucher sur la signature de trois accords
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Sobre Le grand invité Afrique

Du lundi au samedi, Christophe Boisbouvier reçoit un acteur de l'actualité africaine, chef d'État ou rebelle, footballeur ou avocate... Le grand invité Afrique, c'est parfois polémique, mais ce n'est jamais langue de bois.
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